GÉNIE TECHNIQUE HORLOGER

Inventeur du plus petit mouvement mécanique au monde, créateur de la première montre bracelet pour homme, à l’origine des premiers compteurs pour l’aviation et l’automobile.

PDG des établissements Jaeger et collaborateur d’Edmond Jaeger

Directeur-administrateur des Ets Jaeger puis président d’administration de Jaeger-LeCoultre en 1946

Directeur technique de Jaeger puis Jaeger-LeCoultre

À l’origine de plus de cinq cents brevets

Chevalier de la Légion d’honneur

Henri Rodanet est digne des plus grandes « success stories » horlogères. Orphelin de père et de mère à 8 ans, Henri Rodanet étudie à l’École d’Horlogerie de Paris fondée par son oncle Auguste H. Rodanet. Il sort premier de sa promotion avec les félicitations du président de la République Emile Loubet.

En 1902, tout juste âgé de dix-huit ans, le jeune prodige devient le collaborateur du français Edmond Jaeger, qui ne compte alors que cinq personnes.

Déjà à cette époque, Henri Rodanet se fait remarquer par ses dons exceptionnels en obtenant de nombreux brevets et ne tarde pas à prendre la direction technique de l’entreprise pour s’occuper de toutes les questions relatives à la création de nouveaux produits.

 

Affiche représentant l’essor international de Jaeger

La conjugaison des deux talents, Edmond Jaeger et Henri Rodanet scelle le destin de l’entreprise en la conduisant au sommet. Tournés vers l’avenir, ils réussissent à créer des garde-temps d’esthétisme intemporel complétés de fonctionnalités innovantes et pratiques mais également à contribuer au succès de plusieurs maisons horlogères.

Pendant la Première Guerre mondiale alors qu’il est au front à Ypres, Henri réalise au nom des Ets Jaeger un tachymètre spécial à la demande des forces aériennes britanniques. Son rôle primordial est de contrôler le nombre de tours du moteur pour éviter la surconsommation du carburant ou la panne du moteur. Henri innove par l’installation d’un bureau d’études unique en son genre et développe à un degré élevé les services de métrologie. En 1919, le journal La Presse annonce « un succès foudroyant » des compteurs Jaeger après avoir subi des épreuves de contrôle extrêmement sévères auprès des services techniques français et alliés. Tous les aviateurs soucieux de leur sécurité ont exigé sur leurs avions le compteur Jaeger. En 1921, le classement officiel du Grand Prix du Mans indique que les neuf premières voitures avaient toutes des compteurs Jaeger. 

 

Compteur Jaeger sur une Aston Martin

 Très sport – 01/06/1926

Le développement des montres de bord pour l’automobile et l’aviation (compteurs Jaeger, tachymètres…) et le développement des toutes premières montres bracelets extra-plates dédiées à la maison Cartier permettent un essor considérable de la maison Jaeger avec son implantation à l’international. Promptement, Henri Rodanet coopère avec le joaillier Louis Cartier pour réaliser une collection de montres extra-plates. Lors de la conférence d’Henri Rodanet au Conservatoire National des Arts et Métiers en 1949, il indique : « Les hasards de la vie m’ont fait collaborer avec Louis Cartier, l’animateur indiscutable de cette révolution dans l’art de présenter l’heure, qui commença en 1904. » En effet, Henri Rodanet est à l’origine de la toute première montre-bracelet pour homme : la Santos de Cartier. Un dessin de 1908 paraphé « HR » vient illustrer cette création. D’autres créations suivront comme la Tank et ses diverses variantes, la montre Tortue, la montre Cloche … des modèles qui rencontrent un tel succès qu’ils seront portés par de nombreuses personnalités.

 

Le Calibre 101

Henri Rodanet poursuit ses créations au nom de l’entreprise Jaeger avec le plus petit mouvement mécanique au monde imaginé dans les tranchées : la célèbre montre Duoplan au mouvement baguette qui deviendra le Calibre 101 après améliorations techniques. Une invention majeure dans toute l’histoire de l’horlogerie puisqu’elle réalise une double prouesse : technique, en prouvant que précision et petitesse n’enlève rien à la fiabilité, et à l’esthétisme en affranchissant les garde-temps de la forme ronde classique et présentés dans le style Art Déco. Le Calibre 101 est révolutionnaire par sa taille et son poids d’à peine un gramme, et marque l’aboutissement de la miniaturisation de montres. Ce bijou de microtechnique eut le privilège d’être porté par la reine Elisabeth II d’Angleterre à son couronnement en 1953.

Duoplan pour la Maison Hermès

Également, Henri Rodanet crée la légendaire Reverso en collaboration avec l’ingénieur français René-Alfred Chauvot. Le mécanisme de retournement breveté par Chauvot est un accessoire qui permet de faire glisser puis retourner le boîtier de la montre bracelet de sorte à protéger son cadran. Par ses connaissances des montres extra-plates, l’ingénieur horloger Henri Rodanet sait intégrer un calibre précis suffisamment plat et résistant aux chocs pour limiter les vibrations du mécanisme dans cette forme rectangulaire. Ce sytème accessoire permet de protéger le cadran mais il reste crucial que le mouvement demeure intact en cas de choc. Son goût de l’esthétisme apporté au boîtier dans un style Art déco rend cette montre intemporelle.

 

Premier modèle de la Reverso

Il améliore techniquement l’iconique pendule à mouvement perpétuel Atmos pour la produire en série. Elle connaît un immense prestige auprès des chefs d’État, souverains et autres personnalités du monde de la culture.

La maison Jaeger devient une entreprise franco-suisse en 1937 par la fusion avec la manufacture LeCoultre.

Lors d’une interview donnée en octobre 1938 au Journal Suisse de l’Horlogerie (JSH), Gustave Delage confiait au moment de l’Exposition de Paris en 1937 que le département d’horlogerie fine de Jaeger remportait la plus haute récompense de sa classe et que cette distinction revenait pour une grande part aux initiatives de son directeur Henri Rodanet « Technicien de grande valeur, artiste autant qu’inventeur, Président de la Chambre syndicale d’horlogerie de Paris… aujourd’hui la figure la plus marquante de l’horlogerie française ».

M. Delage a également insisté « sur l’admirable esprit d’entreprise qui a jadis convaincu M. LeCoultre (Jacques-David) d’accepter les propositions de Jaeger. Il comprit qu’en restant isolé au Sentier, il risquait de limiter le développement de son usine. » En effet, la réussite de LeCoultre est en grande partie liée au dynamisme des établissements Jaeger à Paris qui absorbent les trois quart de la production de LeCoultre & Cie durant l’entre-deux-guerre.

En tant que directeur technique de Jaeger-LeCoultre, Henri Rodanet développe de nombreuses autres créations emblématiques portées par des personnalités et toujours commercialisées sous diverses variantes.

Durant la Seconde Guerre mondiale, l’ingénieur Henri Rodanet sauve Jaeger-LeCoultre en organisant l’évacuation du personnel, de son matériel de production et de ses marchandises de valeur sous peine que les allemands s’accaparent l’entreprise. L’exode s’étend sur dix-huit jours où s’entremêlent affolements, paniques et déboires liés aux nombreux bombardements à Paris et à Orléans. Le journal de ces journées noires écrit par Henri Rodanet est retranscrit dans le livre H. Rodanet, L’Histoire Exceptionnelle d’une Dynastie Horlogère et JaegerL’École d’Horlogerie de Paris.

En avril 1946, Henri Rodanet est nommé président du conseil d’administration de l’entreprise.

De gauche à droite: M. Peters, le directeur technique de l’école d’horlogerie Peters de Washington, Henri Rodanet, directeur technique de Jaeger-LeCoultre, J.V.P. Heinmueller, Président de Longines-Wittnauer Watch Company in USA, C.G Smith, instructeur en chronométrie à l’école Peters. Juin 1950.

Sans conteste et comme le souligne l’un des responsables patrimoine Jaeger-LeCoultre : « Henri Rodanet a joué un rôle central au cœur de notre histoire ».

 

Hommage à Henri Rodanet en 1956 – Journal Suisse de l’Horlogerie et paru dans la revue interne Tic Tac de Jaeger-LeCoultre